J'aperçois un gauchiste et son faciès infâme,
La rage et la pitié se disputent mon âme ;
Dois-je par un effort, que je crois surhumain
À qui veut la couper tendre ma ferme main ?
Il a son libre arbitre et plus de vingt ans d'âge,
Devrait-il — c'est folie — échapper au lynchage ?
Je songe à lui parler, mais que peut ma raison
Face aux murs endurcis du fort de l'émotion ?
C'est un homme et j'éprouve, en conscience avertie,
Envers le sexe faible un peu plus d'empathie ;
Rien ne semble imposer à mon esprit fervent,
De quoi bien réprimer son mécontentement.
Comment un homme blanc, vainqueur de toute époque
Peut-il de son passé clamer « oui je m'en moque ! » ?
Et comment, de surcroît, niant son sang guerrier,
Peut-il à qui le veut gentiment se donner ?
Certains diront « langueur », d'autres crieront « parjure ! »,
Peut-on à son pays faire plus grande injure ?
Ses aïeux sont là-haut, et dédaignant son rang,
Il fait fi des douleurs, des larmes et du sang,
Ce sang qui lorsqu'il coule au-delà des frontières
Engendre à ce dément d'innombrables misères,
Mais quand il coule ici, provoquant quelque émoi,
Au revers du bon sens le fait demeurer coi.
Néanmoins, non content de sa froideur funeste,
Il gronde, il parle enfin, il s'agace, il conteste ;
Voyant certains Français ne voulant point mourir,
Il voudrait empêcher ceux-là de discourir.
Se croyant défenseur de la liberté reine,
Quand l'un dit « détracteur » lui nomme plutôt « haine ».
Faut-il donc être haineux pour préférer les siens,
Vouloir les épargner de macabres desseins ?
Faut-il donc être fou pour aimer sa famille,
Du regard de ses sœurs conserver la pupille ?
C'est ce qui m'apparaît si j'en crois cet infect
Et que je prends pour vrai tout son verbiage abject.
La charité chez lui est tout sauf ordonnée
Et ne se voit jamais au Bien subordonnée,
Préférant mille fois un continent lointain,
— « Proche » a pourtant donné l'appellation « prochain » —
Il s'agite toujours pour défendre « le monde »,
Mais quand à notre seuil le plus noir péril gronde,
Pire que de se taire il œuvre à ses côtés
L'aidant à s'affermir par tant d'atrocités.
Il est devant mes yeux, cet ignoble transfuge,
La rue est clairsemée, il n'a point de refuge,
Ce ne sont pas ses mots qui le protégeront,
Ni ses deux bras chétifs, quelle horreur ! quel affront !
Il n'a donc rien pour lui : voilà ! je crois comprendre !
Est-ce donc pour cela qu'il aime tant se vendre ?
Est-ce par lâcheté, faiblesse, abattement
Qu'il se meut chaque jour contre son propre camp ?
À moins que consciemment, la Beauté il refuse,
Et pour la dévoyer, chaque jour une ruse
Naît comme une fleur noire en son pervers esprit ;
Se sentira-t-il mieux si tout est avili ?
Je le regarde encore et tout mon sang bouillonne,
Ma Muse veut rimer mais ma fureur résonne :
La plume ou bien le poing ? quel moyen retenir ?
Un second traître au loin ! je n'ai plus à choisir !
~ Alexandre Charpentier
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